Mots d'images

Les grands classiques

Le 21 juillet 1969, Neil Armstrong et Buzz Aldrin se posent sur la lune devant des millions de téléspectateurs ébahis (alors que leur compagnon Michael Collins reste en orbite autour de la Lune, dans la capsule Apollo). « C’est un petit pas pour un homme, mais un bond de géant pour l’humanité. » [1] dira Armstrong en posant le pied sur la Lune. La photo de son empreinte (ou celle d’Aldrin ?) figure parmi les clichés les plus emblématiques de cette expédition. Bien que n’étant pas l’oeuvre d’un grand photographe, on comprendra aisément que cette photo a toute sa place ici. On aurait tout aussi bien pu y mettre celle-ci ou celle-là (© NASA), plus spectaculaires... mais je trouve cette empreinte bien plus symbolique. Elle marque le passage de l’homme en une belle métaphore. Cette trace de pas est déjà un document en soi. Si aucune météorite ne vient l’altérer, elle peut rester telle qu’elle pendant des millions d’années. Cela lui procure une durabilité largement supérieure à celle de la photo qui en témoigne. La photo n’est donc ici qu’une attestation fugace, le vrai document étant cette empreinte dans la poussière, là-haut. On peut la comparer aux traces de dinosaures que nous découvrons sur terre !
Cette image nous remémore une théorie du complot, qui est apparue dès 1968. Selon celle-ci, tout le programme Apollo ne serait qu’un gros bidonnage et les cosmonautes ne se seraient jamais posés sur la Lune. Les arguments les plus divers, souvent naïfs, ont été avancés. Tous ont été facilement démontés par l’ensemble de la communauté scientifique. Lamentables et risibles histoires !
D’un tout autre tonneau est le film « Opération Lune » de William Karel, sorti en 2002, coproduit et diffusé plusieurs fois par Arte. Le film se présente comme un documentaire qui nous révèle tout ce que le gouvernement étasunien était censé avoir organisé pour garantir la suprématie américaine dans la conquête spatiale. La NASA aurait fait appel au savoir-faire de Stanley Kubrick (2001, l’Odyssée de l’espace - sorti en 1968) pour tourner de fausses scènes sur la Lune. Avec quelques subtils détournements d’images, William Karel nous emmène dans une enquête délirante. J’ai vu ce film en ratant la présentation et le générique (oui, je sais c’est mal, mais c’est peut-être cela qui m’a permis de le prendre au 1er degré) et j’ai été franchement ébranlé, voire atterré, par ce que j’y voyais. Mais, progressivement, le cinéaste introduit des invraisemblances plus ou moins criantes et pousse le spectateur vers des conclusions démesurées. Ce dernier prend alors conscience, peu à peu, qu’il a été berné, que sa foi dans la vérité des images a été malmenée. Magistral !

Notes:

[1] Armstrong aurait dit : « That’s one small step for (a) man, one giant leap for mankind. » Au début, le « a » ne faisait pas partie de la phrase rapportée. Ce n’est qu’après une écoute attentive que l’on a conclu que ce « a » avait été effacé par une perturbation de la transmission radio.

Béat Brüsch, le 1er août 2007 à 12.50 h
Rubrique: Les grands classiques
Mots-clés: manipulation , métaphore
5 commentaires
Les commentaires sont maintenant fermés.
    1

    Je ne comprends pas la photo : pourquoi l’empreinte est-t-elle positive ? Cela ressemble beaucoup plus a un bout de semelle décollé qu’a une empreinte. (Et je n’écris pas ça pour polémiquer, mais seulement parce que l’image me pertube).

    Envoyé par Yann, le 3.08.2007 à 01.41 h
    2

    Nous sommes tous victimes, à un moment ou à un autre, de cette illusion d’optique. Cela provient du fait que nous avons l’habitude, dans une image, que la lumière vienne d’en haut à gauche. Notre cerveau interprète les ombres et lumières selon ce schéma pour déterminer le relief. Si l’éclairage vient du sens opposé, le cerveau en déduit un relief inverse. C’est exactement le cas pour cette image. Je vous propose de copier l’image sur votre disque dur et de la tourner de 180 degrés... vous verrez, l’empreinte est bien en creux ! (Sinon, tournez la tête, mais attention au torticolis !)

    Envoyé par Béat, le 3.08.2007 à 13.01 h
    En ligne ici
    3

    Merci Béat, en effet, saisissant. L’empreinte devient empreinte (pour mon cerveau) en retournant l’image !

    Envoyé par Yann, le 16.08.2007 à 14.09 h
    4

    « nous avons l’habitude, dans une image, que la lumière vienne d’en haut à gauche » :
    parce que notre sens de lecture occidental va de la gauche vers la droite. En BD, si un personnage va de la droite vers la gauche, cela signifie qu’il revient sur ses pas.
    Pour les Japonais c’est le contraire, il suffit de feuilleter un manga pour s’en rendre compte.
    N’empêche, Armstrong aurait pu passer la balayette avant de repartir.

    Envoyé par KA, le 17.08.2007 à 19.12 h
    En ligne ici
    5

    Pour la balayette, il était trop pressé... son copain tournait en rond autour du quartier (de lune) parce qu’il ne trouvait pas de place pour se parquer !

    Envoyé par Béat, le 18.08.2007 à 00.43 h
    En ligne ici