En 1986, peu après l’explosion d’un réacteur à la centrale nucléaire de Tchernobyl, 135’000 personnes ont été évacuées d’une zone de 30 km autour du réacteur. Huit ans plus tard, en 1994, le photographe canadien David McMilan se rend sur place et obtient l’autorisation de circuler et de photographier librement dans la zone. Il y retournera 10 fois.
La région était autrefois prospère et la qualité de vie élevée. Les villes, villages et campagnes ont été abandonnés prestement. Tous les objets étant contaminés, ils ont dû être laissés sur place. On ne peut qu’être saisi à la vue de ces lieux vidés de leurs habitants. On frémit à l’idée de leur brutale évacuation et à l’intensité de leur détresse. Sans entretien, toutes les constructions et autres traces humaines se dégradent peu à peu, alors que la végétation trouve une autonomie nouvelle. On ne voit pas les radiations, mais pour un peu, on entendrait ses oreilles siffler comme un compteur Geiger !
Les prises de vue sont réalisées avec une approche documentaire. Images très propres et fouillées. Cadrages sobres, larges, ne se laissant pas distraire par de vains détails. Lumières douces et jamais équivoques. Pas d’aberrations optiques : toutes les verticales sont rigoureusement verticales. Distance, respect, humilité, caractérisent ce travail à la démarche profondément humaniste.
Les photos ci-dessus sont tirées du site Pripyat and the 30k Zone de David McMilan. Il contient 6 galeries de photos qu’il faut visiter calmement.
Aujourd’hui je vous emmène dans des territoires de l’image peu répertoriés dans les milieux de la photographie. Ici, pas d’artistes ! L’art est tout entier dans le sujet. (Et dans le regard !) Astronomy Picture of the Day (APOD) présente chaque jour une nouvelle image astronomique. Il n’est pas nécessaire d’être féru d’astrophysique pour apprécier la beauté de ces images. Souvent, leurs seules qualités abstraites suffisent à nous couper le souffle. Bien sûr, quand nous en comprenons (un peu) le sens, c’est encore beaucoup plus beau. Chaque image est munie d’une légende explicative comprenant de nombreux liens pour approfondir. Bientôt, si vous suivez quotidiennement ces parutions, vous en saurez beaucoup sur les profondeurs de notre ciel. Il est à remarquer que les images astronomiques sont probablement les plus « bidouillées » qui soient. Tout est mis en oeuvre pour révéler au mieux ce que l’on désire voir : prises de vues dans des longueurs d’ondes choisies, fausses couleurs produites à la prise de vue ou en post-traitement pour mieux discriminer les éléments, compositage de plusieurs vues, masques flous, etc. Cela se fait en toute transparence et les procédés sont toujours clairement indiqués. On peut même dire que les moyens utilisés sont intégrés à la démarche scientifique.
Petite sélection d’images très « abordables » parues récemment...
Cliquer sur les images pour les voir en grand sur le site APOD.
Image d’ambiance. La lune se couche derrière les télescopes du Cerro Paranal où l’on se prépare à une nuit d’observation du ciel de l’hémisphère sud.
Transit de Mercure devant le Soleil. En réalité, une éclipse de Soleil... mais Mercure est bien trop petite pour réellement éclipser le Soleil !
Une Lune patatoïde de Saturne surprise sur son orbite, par la sonde Cassini-Huygens. Cela ressemble à une image de synthèse, mais ça n’en est pas.
Surprenante image de la lune s’apprêtant à passer devant la planète Vénus. Les 2 astres sont tellement lumineux que la photo a pu être prise en plein jour. (Mais bon, il faut dire que cette configuration est impossible en pleine nuit ;-)
Très fine image de la comète Swan qui était dans nos parages ces 2 derniers mois.
Une vue prise par le robot Spirit à partir de Low Ridge hill, son lieu d’hivernage, sur la planète Mars où il est en mission. Il s’agit en fait d’un panorama de 360° qui a été compressé horizontalement.
Celle-ci est pour moi, l’une des plus extraordinaires images parues ces dernières années (1995). Ce gigantesque pilier, formé de gaz et de poussières est une nursery d’étoiles. Les étoiles se forment par accrétion de poussières. Ici, une étoile déjà formée -non visible sur l’image- chauffe le sommet du pilier et provoque l’évaporation des gaz, laissant apparaître des excroissances. Le globule que l’on peut voir au bout des ces excroissances est un gros amas de poussières, qui sous l’effet de la gravitation, va devenir de plus en plus dense, jusqu’a enclencher des réactions nucléaires internes et donner naissance à une étoile et à son cortège de planètes. En savoir +
Phénomène météorologique : un étonnant arc de brouillard sur la Californie.
Une image d’atmosphère, dans tous les sens du terme. Un halo de Lune derrière les miroirs hexagonaux d’un téléscope.
APOD a été créé et édité depuis 1995 par 2 astronomes : Robert Nemiroff de la Michigan Technological University et Jerry Bonnell du NASA’s Goddard Space Flight Center. Si vous en avez marre de démarrer votre browser avec le portail agité de votre provider, essayez APOD. C’est une bonne adresse pour commencer la journée en prenant de la hauteur ! Sur le site Ciel des Hommes, Laurent Laveder vous propose chaque jour, la traduction en français de l’APOD de la veille (cliquez sur L’image d’astronomie du jour). Ce Flux RSS vous permet d’en être informé.
Se mettre dos aux ruines du Worl Trade Center pour photographier le regard des gens. Saisir une atmosphère, loin du tumulte, entre Pakistan et Afghanistan. Faire parler les néons qui éclairent les nuits du monde. S’arrêter pour mesurer les stigmates de l’histoire sur les plages du débarquement. Se projeter dans un non lieux, pour nous faire voir notre propre apocalypse. Montrer la propre violence des murs. Et la douceur des bisous. Qui peut nous faire voir tout cela et bien plus encore ? Depuis 15 ans qu’il existe, on ne présente plus le collectif Tendance Floue : 12 regards différents, une vision commune. Qu’ils travaillent seuls ou en collectif, ils racontent notre temps. Pour eux, rien n’est banal, tout ce qu’on sait voir peut faire sens. Ils sont : Pascal Aimar, Thierry Ardouin, Denis Bourges, Gilles Coulon, Olivier Culmann, Mat Jacob, Caty Jan, Philippe Lopparelli, Bertrand Meunier, Meyer, Flore-Aël Surun, Patrick Tourneboeuf. Installez-vous, réglez vos écrans et passez de grands moments en visitant toutes (oui, toutes !) les galeries de photos de leur site. Sommes-nous ? est le titre de leur expo durant le Mois de la Photo (de Paris, France - Aux Voûtes, 19 rue des Frigos). C’est également le titre de leur dernier livre, avec un texte de Jean Baudrillard. Co-édité par Naïve Livre et Jean di Sciullo Éditions.
Quand Wang Qingsong regarde la Chine s’aligner sur les valeurs occidentales, au détriment de l’héritage culturel de son pays, il trouve une énergie créatrice qui lui fait imaginer les allégorie les plus débridées pour nous l’expliquer. Dans ses mises en scène méticuleuses, le réalisme fantasmé le dispute à la pédagogie.
Lorsqu’il dépeint les développements rapides qui touchent la Chine, il le fait en de grandes fresques sur lesquelles se déroule une histoire, en général assez éloquente. La satyre est partout présente, en particulier dans l’usage détourné de sujets de la peinture classique occidentale. Souvent, ce sont des marques de produits occidentaux qui, confrontés à des réalités chinoises, servent de révélateurs de la frivolité des nouveaux comportements des chinois.
La juxtaposition parfaitement maîtrisée de diverses iconographies, fait constamment ressortir les clivages entre l’orient et l’occident en de provocantes métaphores. Et si l’ensemble peut parfois nous sembler un peu kitsch, n’oublions pas que le kitsch « ...est surtout corollaire des goûts de son observateur. » (Wickipédia)
Il est intéressant de constater que ce type de mise en boîte des méfaits de la consommation n’est possible aujourd’hui qu’en Chine. Dans nos contrées, cela ne frappe plus guère, car nous avons eu le temps de nous habituer ! En Chine, le déferlement est extrêmement rapide. C’est un capitalisme aguerri et conquérant qui débarque en force, dans un pays aux ressources immenses et rendu réceptif par des années de privations. Pourtant, à bien y regarder, la démarche métaphorique de WQ ressemble fort à celles qu’on utilisait en occident dans les années 70 pour l’illustration de magazines. Mêmes maux, mêmes effets ?
Pour nous (qui ne sommes pas des dirigeants politiques ou économiques chinois !) l’oeuvre de Wang Quinsong est très ludique. Et c’est peut-être une des clés de son succès.
Wang Quingsong vit et travaille en Chine ou il est né en 1966. Il est le lauréat du prix Dialogue de l’Humanité aux Rencontres d’Arles de cette année(liens cassés !).
Le site de WangQuingsong, d’où sont extraites les photos montrées ici et où vous pourrez en voir encore bien d’autres.
Je ne pensais pas parler de l’installation de Sophie Riestelhueber. Mais l’ami holbein en a parlé sur son blog et cela m’a fait reconsidérer un peu la chose... Lisez son article et nos échanges ici.