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mot clé «métaphore»

Derrière, devant, ou à côté...
Lectures d’été, pour ne pas perdre le fil.

Derrière les images - Textes réunis et édités par Olivier Gonseth, Jacques Hainard et Roland Kaehr - Musée d’ethnographie de Neuchâtel (Suisse) - 1998 - 360 p. - ISBN 2-88078-023-3

Béat Brüsch, le 30 juillet 2008 à 12.30 h
Rubrique: Divers
Mots-clés: lire , métaphore
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On ne peut rester indifférent aux portraits d’enfants de Loretta Lux. Loin des conventions du genre, reposant sur la tendresse et la joliesse, ses images inquiètent. Il s’en dégage une mélancolie froide qui bouscule nos attentes. Les enfants ont le teint blême. Leur regard est ailleurs. Ils ne sont ni gais ni tristes. Trop sages. Leurs habits d’un autre âge sont comme empesés. Leur tête ou leurs yeux légèrement agrandis semblent disproportionnés. Leurs corps sont littéralement posés dans des décors inhabités et trop grands pour eux.
Au-delà de leurs oripeaux et par leur singularité, ces enfants nous touchent. Leur représentation presque désincarnée nous les fait percevoir comme des métaphores ingénues d’un paradis perdu. Mais c’est bien à nous que s’adresse leur regard. Il nous questionne. Peut-être juste un peu plus gravement que les vrais enfants...


Loretta Lux a une formation de peintre et le revendique. Ses subtiles références à la peinture (en particulier celle de la renaissance) en témoignent. Même si elle utilise parfois des paysages peints en guise de décors, sa démarche s’inscrit pleinement dans une mouvance qui intègre et tire parti des outils numériques. Pour moi, les techniques ne sont pas anodines et contribuent à façonner la vision. Si ces enfants étaient représentés en peinture, ils ne nous toucheraient pas avec la même force. Mais, un peu comme pour désamorcer cet indice de « vérité », l’utilisation des procédés numériques est immédiatement soulignée pour en montrer les limites. Les silhouettes des enfants sont découpées de façon trop nette pour se fondre naturellement dans leur environnement. Les textures des divers éléments entrant dans la composition sont laissées dans leurs dissemblances d’origine. Les éléments rapportés dans le décor ne provoquent que peu ou pas d’ombres (ce qui les intègre mal). Quand on voit, par ailleurs, la virtuosité de Loretta Lux, on ne peut qu’en déduire que ces « imperfections » sont voulues. Ces artifices de montage, qui ne sont pas totalement gommés, contribuent à créer une atmosphère particulière où l’irréel le dispute à l’objectivité. Un peu comme au théâtre, lorsque vibrent les sentiments en même temps qu’on voit les ficelles du décor.


Ces détails de facture sont invisibles dans la version grossière que nous offrent les petites images diffusables sur internet. Comme toujours, rien ne vaut une visite dans les musées et les galeries (ou la consultation de livres d’art bien réalisés).
Le musée de l’Élysée à Lausanne (Suisse) présente une exposition très étendue des oeuvres de Loretta Lux (jusqu’au 4 novembre) (lien cassé). La muséographie est particulièrement soignée. L’accrochage, très sage, sur des murs aux tons pastel, respecte l’esprit méticuleux des oeuvres. Loretta Lux est née en 1969 à Dresde, en Ex-Allemagne de l’Est. Elle a 20 ans quand elle part étudier la peinture à Munich, juste avant la chute du mur de Berlin. Depuis, elle a reçu de multiples récompenses internationales et ses oeuvres sont visibles dans de nombreux musées. Depuis 2003 elle est représentée par la galerie Yossi Milo à New York. Le site de Loretta Lux est à visiter pour avoir une vue d’ensemble et pour apprécier la cohérence de sa démarche.

Béat Brüsch, le 23 octobre 2007 à 11.25 h
Rubrique: Voir de ses yeux
Mots-clés: musée , métaphore , peinture , photomontage
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Chers amis de la poésie et du bon goût, voici une image qui va vous combler...
Cet été, j’ai été amené à changer d’application FTP (File Transfer Protocol - Cela sert à envoyer ou retirer des fichiers sur un serveur distant). On dit beaucoup de bien de RBrowser, alors allons-y. Il y a même une version light gratuite, ça aide. Côté fonctionnement du programme : rien à dire, l’informaticien à fait du bon boulot. Pourtant, lorsqu’on télécharge un fichier, voici la jolie petite icône qu’il nous présente, pour le cas où nous voudrions interrompre l’opération...
Vous remarquerez le délicat liseré rouge sur la lame. Si votre écran est de bonne qualité, vous verrez aussi que le bas des montants de bois est teinté de rouge. Là, je vois votre imagination galoper... vous vous dites que si on clique sur le bouton pour interrompre le téléchargement on va voir tomber la lame. Vous avez tout juste !
Le terme abort, bien que correct d’un point de vue informatique, n’est déjà pas des plus élégants (le sens premier signifie avorter). On aurait pu, de surcroit, nous épargner la violence de cette icône. Tous les designers savent que, sous des dehors pauvres, les icônes peuvent présenter un contenu sémantique plus large. En général, elles ne font sens que dans un contexte donné et convenu. Leur succès dans les interfaces d’ordinateurs, en tant que raccourcis, est justement dû à cela. (Une représentation d’imprimante = « Je voudrais bien que mon ordinateur demande à mon imprimante d’imprimer cette page »). Si on décide d’enrichir ce concept basique en utilisant des métaphores visuelles plus « ambitieuses », il faut alors, mesurer toute l’étendue du champ sémantique qu’elles recouvrent. Cela demande un certain doigté que ne possède pas le premier informaticien venu, aussi génial soit-il. (Certains sont aussi doués pour la communication visuelle que je le suis moi-même en informatique ;-)
Inculture ? Ignorance ? Infantilisme ? Manque de repères ? Irrespect ? Humour ? Provocation ? Pour moi c’est un peu tout cela à la fois : aujourd’hui on ose. On ose tout.
Soyons plus clairs. Il n’y a pas de sujets tabous et on peut tout dire, tout faire. Mais dans un contexte défini. On ne peut pas poser n’importe où et n’importe comment, un symbole aussi connoté qu’une guillotine, alors que 69 pays dans le monde, à commencer par les plus grands (Chine, Etats-Unis) maintiennent encore la peine de mort.
Chiffres et arguments ici :
Wikipedia, Amnesty international, Coalition mondiale contre la peine de mort. (Je ne mets pas de lien vers ce logiciel. Vous le trouverez facilement si le coeur vous en dit.)

Béat Brüsch, le 5 septembre 2007 à 16.50 h
Rubrique: A propos d’images
Mots-clés: métaphore , société , éthique
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Les grands classiques

Le 21 juillet 1969, Neil Armstrong et Buzz Aldrin se posent sur la lune devant des millions de téléspectateurs ébahis (alors que leur compagnon Michael Collins reste en orbite autour de la Lune, dans la capsule Apollo). « C’est un petit pas pour un homme, mais un bond de géant pour l’humanité. » [1] dira Armstrong en posant le pied sur la Lune. La photo de son empreinte (ou celle d’Aldrin ?) figure parmi les clichés les plus emblématiques de cette expédition. Bien que n’étant pas l’oeuvre d’un grand photographe, on comprendra aisément que cette photo a toute sa place ici. On aurait tout aussi bien pu y mettre celle-ci ou celle-là (© NASA), plus spectaculaires... mais je trouve cette empreinte bien plus symbolique. Elle marque le passage de l’homme en une belle métaphore. Cette trace de pas est déjà un document en soi. Si aucune météorite ne vient l’altérer, elle peut rester telle qu’elle pendant des millions d’années. Cela lui procure une durabilité largement supérieure à celle de la photo qui en témoigne. La photo n’est donc ici qu’une attestation fugace, le vrai document étant cette empreinte dans la poussière, là-haut. On peut la comparer aux traces de dinosaures que nous découvrons sur terre !
Cette image nous remémore une théorie du complot, qui est apparue dès 1968. Selon celle-ci, tout le programme Apollo ne serait qu’un gros bidonnage et les cosmonautes ne se seraient jamais posés sur la Lune. Les arguments les plus divers, souvent naïfs, ont été avancés. Tous ont été facilement démontés par l’ensemble de la communauté scientifique. Lamentables et risibles histoires !
D’un tout autre tonneau est le film « Opération Lune » de William Karel, sorti en 2002, coproduit et diffusé plusieurs fois par Arte. Le film se présente comme un documentaire qui nous révèle tout ce que le gouvernement étasunien était censé avoir organisé pour garantir la suprématie américaine dans la conquête spatiale. La NASA aurait fait appel au savoir-faire de Stanley Kubrick (2001, l’Odyssée de l’espace - sorti en 1968) pour tourner de fausses scènes sur la Lune. Avec quelques subtils détournements d’images, William Karel nous emmène dans une enquête délirante. J’ai vu ce film en ratant la présentation et le générique (oui, je sais c’est mal, mais c’est peut-être cela qui m’a permis de le prendre au 1er degré) et j’ai été franchement ébranlé, voire atterré, par ce que j’y voyais. Mais, progressivement, le cinéaste introduit des invraisemblances plus ou moins criantes et pousse le spectateur vers des conclusions démesurées. Ce dernier prend alors conscience, peu à peu, qu’il a été berné, que sa foi dans la vérité des images a été malmenée. Magistral !

Notes:

[1] Armstrong aurait dit : « That’s one small step for (a) man, one giant leap for mankind. » Au début, le « a » ne faisait pas partie de la phrase rapportée. Ce n’est qu’après une écoute attentive que l’on a conclu que ce « a » avait été effacé par une perturbation de la transmission radio.

Béat Brüsch, le 1er août 2007 à 12.50 h
Rubrique: Les grands classiques
Mots-clés: manipulation , métaphore
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Aujourd’hui j’ai honte. J’ai honte de ces 2 petites lettres .ch à la fin de mes adresses internet. Ce n’est pas que j’en suis particulièrement fier en d’autres temps, mais là vraiment...
Figurez-vous que dans mon beau pays, toujours prêt à donner des leçons de démocratie et de droits humanitaires à qui n’en veut, on soutient, avec 46 autres états, une interdiction totale des bombes à sous-munitions (Déclaration finale de la Conférence des sous-munitions à Oslo, les 22 et 23 février dernier). Très bien, me direz-vous... mais attendez...
En même temps, la Suisse détient un stock de 200.000 obus à sous-munitions, produits en collaboration avec Israël. À deux pignons près, il s’agit des mêmes que ceux utilisés au Sud Liban, où, depuis le cessez-le-feu d’août 2006, 30 habitants ont été tués et 186 blessés par les « restes » de ces engins. Le Conseil Fédéral [1] soutient que la Suisse a besoin de ces armes pour assurer la défense de son territoire.
Marelle Cette position de faux-cul me met hors de moi. C’est pourquoi je me permets de transgresser les habitudes thématiques de ce blog (mais je vous colle quand même une très bonne image !). Suite à une initiative parlementaire, le parlement devrait décider ces jours, si ces munitions doivent être mises à la casse... Mais il semblerait qu’en la matière, le parlement n’a qu’un rôle incitatif. Attendons donc de voir si notre gouvernement reste accroché à son fromage... Un fromage qui commence à schlinguer terrible...
Vous trouverezun article détaillé de cette affaire sur le site du journal Le Courrier. Le site de Handicap International est à visiter ici. L’initiative parlementaire est présentée sur le site de sousmunitions.ch et le texte original de l’initiative est à lire ici. L’image de la marelle, une métaphore comme je les aime, est de l’agence TBWA Belgique.

Notes:

[1] Pour nos amis français qui, pour la plupart, ne connaissent pas les institutions politiques suisses, disons que le Conseil Fédéral est le gouvernement de la Suisse. Il est composé de 7 ministres de différents bords politiques, élus par l’assemblée fédérale (la réunion des 2 chambres). Chaque année, à tour de rôle, un des ministres devient le président de la Confédération (cela nous évite de mettre le pays sens dessus dessous à chaque quinquennat !).

Béat Brüsch, le 7 mars 2007 à 14.55 h
Rubrique: Divers
Mots-clés: guerre , métaphore
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